Pour Tom Wilson, la blague avait assez duré
MONTRÉAL – Le visage de Tom Wilson était devenu ce que les jeunes appellent un meme, ces images virales récupérées à tout vent pour servir de véhicule aux inspirations humoristiques du moment.
Son faciès crispé imitant un bébé en pleurs, capté par les caméras de télévision après sa prise de bec avec Josh Anderson dans le troisième match de la série entre le Canadien et les Capitals, n'en avait pas fait que l'objet de moqueries sur le web. Des comiques autour du Centre Bell dimanche l'avaient imprimé et en avaient fait un masque pour le substituer à leur propre binette. « Besoin d'une sieste? » pouvait-on lire, à côté de ladite photo, sur une pancarte exhibée à travers une baie vitrée pendant la période d'échauffement.
Wilson était le sac de sable et les partisans du Canadien le gant de boxe. C'était de bonne guerre. Lui-même avait été capable d'en rigoler quelques heures avant le duel numéro quatre, pour lequel il avait quand même pris la résolution de mieux contrôler ses émotions.
Maintenant que ce match est derrière nous, ce sont les détracteurs de Wilson qui rient jaune.
Le perturbateur en chef des Capitals a été de tous les combats dans la victoire qui a permis aux siens de prendre une avance de 3-1 dans la série. Il a décoché six tirs vers le filet adverse et livré six mises en échec. Il a marqué le dernier but des siens dans un filet désert, une réussite qu'il s'est assuré d'aller célébrer sous le nez des spectateurs qui le conspuaient dans un coin de la patinoire.
Il a été l'attaquant le plus utilisé (21:16) par l'entraîneur-chef Spencer Carbery, qui a autant saupoudré ses présences en avantage numérique (5:52) qu'en désavantage numérique (2:38).
Wilson a surtout porté le coup qui a coupé le souffle au Canadien et propulsé son équipe vers la victoire. Sa mise en échec percutante aux dépens d'Alexandre Carrier, en troisième période, a placé les Capitals dans une position de force de laquelle le Canadien devra travailler très fort pour les déloger.
« Ça a complètement changé l'allure du match et ça illustre parfaitement l'un des éléments qu'il apporte à notre équipe, a louangé Carbery au podium d'après-match. Il peut contribuer à nos succès de tant de façons, tout le monde ici est conscient du genre d'impact qu'il peut avoir. C'est un joueur unique et on a vu à quel point sa présence peut être cruciale pour une équipe qui tente de revenir de l'arrière et gagner un match dans la période la plus importante de l'année. »
« Tom, c'est notre leader émotionnel dans l'équipe, a étiqueté Pierre-Luc Dubois, qui joue avec Wilson sur un trio complété par Connor McMichael. Il est capable d'être calme, il est capable d'accélérer, il est capable d'être émotif quand il en a besoin. Dans les séries, avec la foule ici, ce sont des matchs avec beaucoup de passion, ça joue physique. C'est ça sa job par moments, mais cette année il a aussi marqué [33] buts. Il est capable d'un peu tout faire sur la glace. On l'a vu ce soir. Quand Tom joue comme ça, il n'y en a pas beaucoup comme lui dans la Ligue nationale. »
« Il n'y a rien qu'il ne fait pas pour nous », a résumé Brandon Duhaime, qui a profité du séisme provoqué par la chute de Carrier pour marquer le but égalisateur.
Assis à la droite de Wilson devant les journalistes, le gardien Logan Thompson a feint une hésitation quand il a été questionné sur son partenaire d'estrade. « Tu veux vraiment qu'il s'enfle la tête encore plus qu'elle ne l'est déjà? », a-t-il demandé à la blague avant de joindre sa voix au concert d'éloges.
« Il est le cœur et l'âme de cette organisation, a-t-il dit au sujet du vétéran de 31 ans qui a disputé ses 926 matchs dans la LNH dans l'uniforme des Capitals. Il fait des gros jeux, il donne de grosses mises en échec et toute l'équipe se nourrit de sa contribution. On l'adore. »
Wilson aurait pu profiter de sa tribune pour tourner le fer dans la plaie de ses adversaires ou faire un petit coucou à ceux qui s'étaient moqué de lui. Il a plutôt agi en bon politicien. Sagement, il a évité les perches qui lui étaient tendues dans l'espoir qu'il jette plus davantage d'huile sur le feu.
Qu'importe. Ses performances sur la patinoire lui avaient déjà valu le mot de la fin.