Réjouissez-vous... malgré tout!
MONTRÉAL - Tom Wilson n'a pas seulement fait mal à Alexandre Carrier lorsqu'il a solidement mis en échec le défenseur du Canadien au centre de la patinoire en début de troisième période.
Il a « gelé » le Tricolore au grand complet.
Presque aussi secoués que leur coéquipier qui a dû retraiter au vestiaire après avoir passé quelques minutes au banc avec un sac de glace appliqué sur sa nuque, les joueurs du Canadien ont semblé perdre leurs moyens. Résultat : ils ont permis aux « Caps » de niveler les chances (2-2) quelques instants plus tard, et de se sauver ensuite avec une victoire de 5-2.
Cette victoire des Capitals fait mal. Elle fait même très mal si on se fie aux réactions de l'entraîneur-chef Martin St-Louis une fois en salle de presse pour l'analyser; la commenter.
« J'ai aimé notre match », a-t-il laconiquement offert en guise de réponse à une première question.
Mais encore? « On était là... on s'est bien battu », qu'il a ajouté très lentement.
Rarement avait-on vu St-Louis aussi « sonné » après une défaite. Comme si Tom Wilson lui était aussi passé sur le corps.
Bon! C'est un brin normal puisqu'au lieu de mettre le cap sur Washington avec la confiance associée à une série à égalité, le coach et son équipe feront face à l'élimination, mercredi soir, dans la capitale américaine.
Plongé dans des pensées, jonglant avec le bouchon de la bouteille d'eau qui se trouvait devant lui, Martin St-Louis a finalement lancé : « Je me sens mal. Je ne sais pas quoi leur – ses joueurs – dire. C'est difficile d'expliquer comment je me sens », que l'entraîneur-chef a ajouté.
Des années de bonheur
À court de mots, Martin St-Louis a même ouvert la porte à des suggestions de commentaires à formuler à ses joueurs en marge de cette défaite qui a fait très mal, aux sens propre et figuré.
Une invitation que j'ai acceptée tout de go!
Car s'il est hors de question de se réjouir de la défaite du Canadien, il est permis, et je le crois fermement, de trouver des sources de réjouissance dans le revers encaissé dimanche.
À commencer par l'attaque massive qui a permis au Canadien de marquer deux fois, dimanche, après avoir marqué deux autres fois vendredi soir.
Le premier des deux buts a mis en vedette Juraj Slafkovsky, Ivan Demidov et Lane Hutson. Slafkovsky n'a pas seulement marqué. Il a surtout orchestré une sensationnelle entrée en territoire ennemie que Hutson et Demidov ont ensuite poursuivie pour mettre la table au but qui a remis le Canadien dans le match en créant l'égalité 1-1.
Avec un âge combiné de 61 ans – c'est un an de plus jeune que moi et je me considère encore jeune malgré quelques cheveux gris – et une expérience dans la LNH qui se calcule en matchs disputés et non en années, ce trio est déjà une puissante source de réjouissance.
Avec Cole Caufield – il a marqué le deuxième but en attaque massive dimanche sur des passes de... Hutson et Demidov – et Nick Suzuki qui sont peut-être déjà des vétérans, mais qui sont encore très loin d'être vieux, l'attaque à cinq du Canadien semble devenue une source de laquelle le bonheur associé aux succès en supériorité numérique jaillira pour des années à venir.
Ce à quoi Martin St-Louis a acquiescé.
Pas sûr que ma suggestion lui a permis d'atténuer totalement le mélange de douleur et de déception associé à cette défaite qui fait mal, mais il a quand même esquissé un petit sourire.
Laine poussé vers la sortie
Comme les partisans qui suivent attentivement chaque permutation de ces cinq joueurs en zone ennemie, qui se régalent des nombreuses passes rapides et précises échangées en attendant le tir sur réception qui leur permettra de se lever d'un trait et de célébrer, je regardais cette toute jeune attaque massive se déployer en je me disais que l'avenir du Canadien est vraiment très prometteur. Au moins à ce chapitre.
Sur la galerie de presse, à une trentaine de bancs à ma gauche, Patrick Laine, assis avec les autres blessés/exclus du Canadien, était à même de constater la même chose.
Laine a été un rouage crucial de l'attaque massive cette année. Une attaque massive qu'il a réanimée dès son retour au jeu comme le confirment les 15 buts qu'il a marqués.
Mais les petits gars qui viennent de marquer quatre buts en neuf attaques massives aux dépens d'une équipe qui a été solide toute l'année – les Caps ont terminé la saison au cinquième rang avec une efficacité de 82 %, 1,6 % seulement de moins que les meilleurs de la Ligue : les Hurricanes – sont en train de prouver que le Canadien pourrait bien se passer de lui en attaque massive l'an prochain.
Peu importe les conséquences à l'endroit de Laine, un fait demeure : avec Cole Caufield qui est de retour dans son vrai bureau maintenant que Laine est sur la galerie de presse, avec Ivan Demidov qui semble déjà plus efficace que Caufield de l'autre côté du filet, avec Slafkovsky qui sera de plus en plus fort autour des gardiens adverses, avec Hutson qui est déjà un magicien pour distribuer la rondelle – il ne lui reste qu'à améliorer son tir pour avoir une arme supplémentaire – et Nick Suzuki pour diriger tout ça, il y a vraiment de quoi se réjouir.
Même si le Canadien a perdu dimanche. Même s'il fera face à l'élimination mercredi. Même s'il devait se retrouver en vacances jeudi matin.
Ce qui est loin d'être acquis.
Réactions exagérées
Je déteste au plus haut point tomber dans le jeu des partisans – peu importe leur allégeance – quand vient le temps de déterminer si une pénalité était méritée et un autre ne l'était pas vraiment ou pas du tout.
Je déteste ces débats, car ils sont justement toujours teintés de partisanerie. Un joueur de votre équipe peut se permettre d'enfreindre les règles sans être puni, car il ne les a pas vraiment enfreintes. Mais si c'est un de vos favoris qui est victime du même geste, alors là il faut sévir tout de suite et sans appel.
Vous voyez le genre. Mais bon : dans le sport comme en amour, le cœur a ses raisons que la raison ne comprend pas toujours... même rarement!
Est-ce que les arbitres ont commis des erreurs dimanche? Bien sûr!
Ils en ont toutefois commis moins que les 36 joueurs qui ont pris d'assaut la patinoire du Centre Bell et les gardiens qui défendaient les buts des deux équipes.
Calmement, en mesurant le poids de ses mots, Martin St-Louis s'est permis d'associer le désarroi qu'il affichait après le match au travail des arbitres. Des arbitres qui ont accordé une attaque massive de plus (cinq) aux Capitals qu'à sa formation.
Ce n'est pas le nombre de pénalités que St-Louis a contesté. Il n'a pas non plus remis en question le fait que la ruade de Tom Wilson aux dépens d'Alexandre Carrier ait été tolérée. Ce qui me semblait la bonne décision.
C'est plutôt le fait que deux pénalités décernées au Canadien ont suivi des réactions que le coach du Tricolore considérait exagérées, et que le superviseur des arbitres avait avisé les états-majors de deux équipes, en matinée, que ces mascarades seraient surveillées de près dans le cadre du match.
Si elles l'ont été, elles n'ont pas entraîné de pénalité. Je pense ici aux réactions de Pierre-Luc Dubois et de Tom Wilson.
Dubois a été atteint à la visière par le bâton de Christian Dvorak. C'est indéniable. Mais le coup était très loin de justifier le mouvement de tête que Dubois a effectué. Le genre de mouvement qui visait à « vendre » la pénalité... et l'arbitre l'a acheté!
Même chose pour Wilson qui a été poussé par Josh Anderson dans le fond du territoire du Canadien. Mais jamais assez fort pour tomber sur le dos comme il l'a fait.
Dvorak et Anderson méritaient tous deux « d'aller au cachot et s'y sentir honteux », bout de phrase rendu célèbre par le film Slap Shot. Mais Dubois et Wilson auraient facilement pu les accompagner et se sentir plus honteux encore d'avoir joué la comédie.
Est-ce que ces deux décisions des arbitres ont coûté le match au Canadien?
Bien sûr que non!
Surtout que dans le camp des Caps il serait très facile d'identifier et de dénoncer tout autant des décisions qui les ont défavorisés.
Mais il n'en demeure pas moins que les officiels, aussi difficile et ingrat soit leur travail, doivent trouver une façon d'être plus constants dans la gestion des matchs.
Ce qui n'a pas toujours été le cas dans les quatre premières parties de la série opposant le Canadien aux Capitals. Ce qui n'a pas été le cas dans toutes les autres séries non plus.